lundi 4 octobre 2010

Laissez le bon temps rouler


Le polar animalier, on connaissait déjà. Le regretté Macherot et Sokal, entre autres, avait déjà contribué à ses lettres de noblesse. Mais, là, force est de reconnaître que Blacksad, c’est un peu comme si Chaminou passait ses journées à faire du body-bulding et ses nuits à s’hydrater de Bourbon glace plutôt que de jus de salsepareille !
La lecture du 4° tome des enquêtes du chat détective de Juanjo Guarnido et de Juan Diaz Canales vous frappe graphiquement avec la délicatesse d’un uppercut estampillé Mike Tyson. Guarnido alterne scènes d’action qui déménagent et scènes d’ambiance où son dessin se magnifie. Il peut s’agir de représentation de scènes emblématiques de la Louisiane (Carnaval, …) ou de bouges où le Blues coule à flots. Il peut aussi s’agir de scènes plus intimistes où l’action semble s’arrêter pour que l’on puisse mieux admirer le brio technique du dessinateur.

Plusieurs des planches qui composent cet album sont construites en des sortes de camaïeux qui de bleus qui de rouges qui de marrons qui donnent une impression d’ensemble, de totalité. Impression qui s’empare de nous, nous enivre, nous envoûte et nous fait vivre l’histoire de l’intérieur comme si nous étions un des protagonistes.









Le dessin virtuose de Guarnido est aussi servi par un scénar béton de Diaz Canales. Aux confluents d’un « Angel Heart » et d’un « Around midnight », Juan Diaz Canales fait naviguer Blacksad dans les eaux troubles du Mississipi. Cependant, pour lui, les démons du XXI° siècle ne sont plus ni Baron Samedi ni Dhamballah mais bien « Esprit de lucre » et « Sciencesansconscience ».
Diaz Canales compose une ambiance moite, touffue et vénéneuse que n’auraient pas renié de grands écrivains du roman noir sudiste comme Jim Thomson, Day Keene ou, bien sur, Charles Williams.
Comme pour un « Hurricane » ou un « jumbalaya » , tous les ingrédients sont réunis et savamment mélangés pour composer une histoire entêtante comme un riff de blues. Qui dit « blues » dit « alcool, bouge et drogues » ; qui dit « Louisiane » dit « Vaudou ». Qui dit « enquête » dit « privé bien souvent louche ou pourri » !

Écrevisse sur le gumbo. Comme à l’accoutumée, les personnages sont diaboliquement bien animalisés. La palme revenant, à mon goût, au barman taureau bodybuildé qui demande, d’un ton rien moins qu’amène, s’il a une tête de vache laitière au quidam qui lui commande un milk shake. Au bourbon, certes ! Mais, milk shake quand même !!!

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